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Brèves de sexa
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17 mars 2017

Pantoise sur la rive

Mamy et ses soeurs

Les deux petites à gauche de Geneviève sont nées le même jour. C’est tout ce qu’on peut dire : elles sont nées le même jour.

Mamy et TataMado

Pour le reste, l’une est aussi brune que l’autre est blonde, aussi querelleuse que l’autre est tendre. Elle mène son monde à la baguette, Madeleine, elle pleure comme une madeleine, Madeleine, pour obtenir ce qu’elle veut. Et elle l’obtient toujours, au détriment de sa jumelle, trop bonne trop.. bonne. Maman fait des préférences, enfin non ce ne sont pas des préférences, c’est comme ça voilà : la blonde Yvette est docile, donc c'est elle qui reste à la maison pour aider à s’occuper des nourrissons, une tripotée de nourrissons comme autant de frères et de sœurs de lait, pendant que Madeleine-la-tempête parade à l’école. Elle aurait bien voulu, la blondinette, aller aussi à l’école, elle aurait tellement tellement voulu apprendre à lire et à écrire correctement que bien plus tard, quand elle serait grand-mère, elle en parlerait encore avec des gros soupirs de regrets dans la voix, malgré les trente-sept élèves de la classe. Mais voilà, il y a Mado. Mado la première. Première née, première choisie, toujours première.

Quinze ans. Elles ont quinze ans les jumelles. Elles flirtent, même si on n'appelle pas encore ça flirter. Et quand elles regagneront avec leur famille la région parisienne, il y aura une personne de plus : le petitou d’Yvette.

Madeleine, elle, c’est de retour à Paris qu’elle le rencontre, son héros. Il est grand, il est musclé, il tonne fort et large. Quel bel homme ! Elle en est folle. Il ne mesure pas le pouvoir qu’il a sur elle, du moins le croit-elle. On est tellement bête quand on est amoureuse. Il l’emporte comme un torrent et la laisse pantoise sur la rive. À peine a-t-elle retrouvé le souffle qu’il la pousse plus loin encore, toujours plus loin et toujours plus haut. Elle l’admire, elle l’adore. Elle brûle de toute son âme et de tout son corps pour lui. Lui, un descendant de Maréchal des guerres napoléoniennes. Il doit lui en rester quelque chose, il règne sur elle comme un empereur. Là, ce n’est plus elle qui mène à la baguette, c’est lui. Mais elle aime ça Madeleine. C’est ça, un homme.

Madeleine lui donne tout. Ils sont affamés l’un de l’autre, féroce de leur rage de se coller l’un à l’autre. Ils ont le diable au corps et à l’âme, et des deux, c’est elle la plus enragée. Hélas, l’enfant ne vient pas, ce fils qu’elle veut tant lui donner. Et Yvette, elle qui ne veut plus d'enfants, n’arrête pas d’être enceinte. Cela ravive encore et toujours leur rivalité primordiale, malgré les hurlements de la jeunette qu’on entend de loin à chaque visite chez la faiseuse d’ange. Elle s’en fiche, Mado, des cris de sa sœur. Elle veut un enfant elle aussi, c’est tout.

Et elle l’aura, vingt ans après le premier d’Yvette. Deux hommes dans son cœur, deux hommes pour elle seule. Enfin.

La voilà à l’hiver de sa vie, avec pour toute compagnie une longue maladie, comme on dit pudiquement. Elle repense à toutes les fois où devant son mari elle s'est tue, paniquée de lui déplaire et qu'il tonne, encore et encore. Elle repense à toutes les fois où elle s'est enfermée, en adoration devant lui, bien à lui, bien terrée. Il l’a emportée comme un torrent et la laisse pantoise sur la rive. C'est donc là que tous ses maux se sont logés ? 

La femme d'un empereur ne se meurt pas, il faut la cacher. Il interdit à ses soeurs de la visiter.

Elle qui avait si peur de la mort, elle s’en va seule, terrorisée.

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Commentaires
L
J'aime beaucoup votre façon d'écrire. Dans cette époque où prendre un instant pour soi est presque un luxe et tout doit "aller vite", on soupire presque devant un texte qui aurait "l'audace" de faire plus de 5 lignes et il s'en faut de peu pour que l'on abandonne... Merci pour ces jolis moments (oui, oui, je me suis promenée, ça et là, ce fut bien agréable ! 😊)
G
On dirait du Maupassant...C'est triste à...mourir !
J
On ne se rend pas compte lorsqu'on a des rêves d'avoir des enfants, ce que la vie leur réservera.... On les aime, on les couve, on ne veut que leur bien, mais.... la vie est là pour remettre les pendules à l'heure. <br /> <br /> Merci pour cette histoire.
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